La SLA se manifeste de différentes façons chez les personnes qui développent la maladie. Elle peut survenir en tout temps à l’âge adulte. Habituellement, les gens vivent seulement de deux à cinq ans après le diagnostic, mais elle peut durer de six mois à plus de 20 ans. 30 % à 50 % des personnes vivant avec la SLA connaîtront des difficultés cognitives ou comportementales. Pourquoi la maladie touche-t-elle les gens de façon si différente?

Dre Ekaterina Rogaeva, généticienne au Tanz Centre for Research in Neurodegenerative Diseases de l’Université de Toronto, croit que la réponse peut se trouver dans la façon dont les facteurs environnementaux modifient l’ADN des gens lorsqu’ils vieillissent. Ses recherches se concentrent sur les mutations génétiques associées aux troubles du mouvement et à la démence, notamment la SLA, la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson et la démence frontotemporale.

Façon dont les facteurs environnementaux pourraient modifier les gènes

Le vieillissement est le plus grand facteur de risque de développer la SLA et d’autres troubles neurodégénératifs. Habituellement, nous comptons l’âge chronologiquement, en utilisant les années écoulées depuis la naissance, mais des données probantes émergentes indiquent que l’âge biologique peut être différent de l’âge chronologique. L’âge biologique de nos cellules peut être fondé sur la façon dont elles ont été modifiées par des facteurs environnementaux, comme l’exposition au tabagisme, par exemple. Ces facteurs environnementaux peuvent laisser une marque sur l’ADN sans modifier sa structure sous-jacente, dans un processus appelé méthylation de l’ADN. À l’aide d’ADN extrait d’échantillons sanguins, les scientifiques peuvent observer les endroits précis où la méthylation de l’ADN liée à l’âge survient et calculer l’âge de la méthylation de l’ADN, ce qui peut constituer une estimation de l’âge biologique.

« La plupart des gens en bonne santé ont un âge de méthylation de l’ADN très proche de leur âge chronologique », affirme la Dre Rogaeva. « Mais lorsque nous observons des échantillons d’ADN de personnes ayant récemment reçu un diagnostic de SLA, nous relevons des différences entre l’âge de la méthylation de l’ADN et l’âge chronologique pouvant aller jusqu’à seize ans. »

Données provenant d’études sur des jumeaux identiques et des personnes avec C9ORF72-ALS

Il y a plusieurs années, le Dr Lorne Zinman a observé des jumeaux identiques présentant une apparition et une progression de la maladie très différentes à la clinique de la SLA du Sunnybrook Health Science Centre. Ses observations ont poussé la Dre Rogaeva à s’intéresser aux causes possibles de cette situation, étant donné que les jumeaux identiques partagent un ADN pratiquement identique. Ensemble, Dre Rogaeva, son associé de recherche Dr Zhang, Dr Zinman et Dre Janice Robertson au Tanz Centre for Neurodegenerative Diseases de l’Université de Toronto, ont mené des études génétiques sur des échantillons sanguins de jumeaux identiques. Dans leur étude la plus récente sur des jumeaux, un jumeau n’avait aucun symptôme de la SLA, mais l’autre vivait avec la maladie depuis 17 ans, et affichait des antécédents plus importants de consommation de narcotiques que le jumeau non touché par la maladie. En général, ils ont relevé que l’âge de la méthylation de l’ADN du jumeau touché par la SLA était plus vieux de cinq ans comparativement au jumeau non touché. Des résultats semblables ont été observés chez une autre paire de jumeaux identiques.

Ensuite, les Drs Rogaeva, Zhang, Robertson et Zinman ont testé leur théorie à l’aide d’échantillons sanguins provenant d’une population plus générale, soit 46 personnes sans lien de parenté avec la mutation du gène C9ORF72, la forme génétique la plus courante de la SLA. Encore une fois, ils ont relevé qu’un âge de la méthylation de l’ADN accéléré était associé à un âge plus précoce de l’apparition de la maladie et à une progression plus courte de la maladie pour la SLA, et ils ont publié leurs résultats.

Étudier la théorie pour la SLA sporadique

Grâce à une bourse de projet de 125 000 $ du programme de recherche de la Société canadienne de la SLA, la Dre Rogaeva s’inspirera de ses découvertes précédentes chez les jumeaux identiques et les gens avec C9ORF72-ALS et étudiera si l’âge de la méthylation de l’ADN peut également expliquer les différences dans l’apparition et la progression de la maladie chez les personnes atteintes de SLA sporadique. La plupart des cas de SLA, soit environ 90 %, sont sporadiques, ce qui signifie qu’ils ne sont pas liés à une mutation génétique simple héréditaire.

À l’aide d’échantillons sanguins et de données cliniques recueillis auprès de 250 personnes atteintes de SLA sporadique, les Drs Rogaeva et Zhang analyseront les liens entre les signes et les symptômes de la maladie lors du diagnostic et les niveaux de méthylation de l’ADN, y compris l’âge de méthylation de l’ADN. S’ils observent un âge biologique accéléré dans ces échantillons, ils valideront leurs résultats en menant la même analyse avec un plus grand nombre de profils de méthylation de l’ADN recueillis dans le cadre du Projet MinE, une initiative multinationale qui vise à séquencer et à analyser tous les profils d’ADN recueillis auprès de 15 000 personnes vivant avec la SLA. La Société canadienne de la SLA est un contributeur et le fer de lance de la participation du Canada dans ce projet.

« Ma prédiction, c’est que l’âge de méthylation de l’ADN, calculé en fonction des marques sur l’ADN, est associé à une apparition plus précoce et à une progression plus rapide de la maladie », affirme la Dre Rogaeva. « Grâce aux travaux précédents, nous savons qu’il y a 353 zones dans le génome où nous pouvons observer l’âge de méthylation de l’ADN. Nous explorerons des génomes entiers pour voir si nous pouvons trouver plus de zones afin d’ajouter plus de renseignements pour le calcul de l’âge de méthylation de l’ADN. »

« Si une personne avait abordé ce concept avec moi il y a cinq ans, je lui aurais répondu que c’est de la science-fiction », indique la Dre Rogaeva. « Mais puisque je peux voir le lien entre la méthylation de l’ADN et la SLA dans nos propres ensembles de données et observer un lien entre l’âge de méthylation de l’ADN et de nombreuses autres maladies neurodégénératives, cela renforce l’idée que les facteurs génétiques sont secondaires à l’âge en tant que facteur de risque pour ces maladies. »

Il est important de souligner que toute influence de l’âge biologique sur la SLA s’applique seulement aux personnes susceptibles de développer la maladie en premier lieu, vraisemblablement par un ensemble complexe de facteurs génétiques. Ceci étant dit, si l’âge de méthylation de l’ADN influence le moment de l’apparition de la maladie et la gravité de la SLA dans cette population plus générale de gens atteints de SLA sporadique, il pourrait constituer un outil précieux pour mieux comprendre la susceptibilité de développer la SLA et permettre un diagnostic plus précoce, ce qui permettrait de traiter les personnes atteintes de la SLA plus rapidement.

Ce projet de recherche est l’un des huit projets de recherche financés en 2018 par le programme de recherche de la Société canadienne de la SLA, qui constitue la seule source de financement dédiée à la recherche sur la SLA au Canada. Le financement du projet a suivi un processus rigoureux d’évaluation scientifique par des comités de spécialistes internationaux de la SLA. Les membres des comités d’évaluation ont évalué un grand nombre de candidatures pour trouver les projets qui font preuve d’excellence scientifique et qui ont le potentiel de faire progresser le plus rapidement le champ de recherche de la SLA afin de mettre au point des traitements efficaces.

La Société canadienne de la SLA est un organisme de bienfaisance enregistré qui ne reçoit aucun financement public. Tout ce qu’elle fait – du financement de la recherche au soutien communautaire des personnes aux prises avec la SLA – est rendu possible uniquement grâce à la générosité des donateurs et aux partenariats avec les sociétés provinciales de la SLA qui contribuent au programme de recherche de la Société canadienne de la SLA.

Nous vous invitons à envisager de faire un don pour contribuer à un avenir sans SLA.

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